Français

Céline Spector, philosophe : « La fin de l’âge d’or de la démocratie représentative coïncide avec le triomphe des flux de capitaux et d’informations »

L’hubris de la dissolution a fait sortir la Ve République de ses gonds. Habitué à gagner ses paris, le président de la République refuse de perdre et s’enferme dans le déni. Celui qui espérait renvoyer les partis aux oubliettes de l’histoire les a remis au centre du jeu. La fragmentation politique, qui s’aggrave dans la plupart des pays européens, a atteint chez nous un point de rupture, privant la nation de toute majorité de gouvernement. Sans doute ce désordre ne relève-t-il qu’à la marge des imperfections de notre Constitution.

En temps normal, la force de notre régime tient à sa capacité à produire une majorité parlementaire plutôt qu’à encourager le compromis partisan. Le véritable mal réside ailleurs : dans la défaillance d’un ethos susceptible de soutenir les institutions. Il relève des manières de sentir et d’agir des gouvernés et des gouvernants. Rivés sur la prochaine élection présidentielle, les partis affaiblis refusent obstinément toute logique de coalition. Montesquieu l’avait observé dans l’Angleterre républicaine secouée par des guerres civiles, jusqu’au Protectorat et à la Restauration. Là où l’esprit d’une faction n’est réprimé que par l’esprit d’une autre, les chocs se succèdent sans que l’équilibre ne soit jamais trouvé : décrivait-il dans

Il vous reste 77.7% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.