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Budget 2026 : l’amère potion de François Bayrou

François Bayrou, qui parle d’, ne s’était pas trompé : le concert de protestations qui a accueilli ses annonces budgétaires, mardi 15 juillet, l’expose aux mêmes risques que ceux encourus par son prédécesseur, Michel Barnier : une censure à l’automne, qui renverrait le pays à son instabilité politique et à sa fragilité financière.

Souvent décrit comme procrastinateur ou louvoyant, le premier ministre n’en a pas moins pris son risque. Sa conférence de presse, intitulée « L’heure de vérité », ses propos dramatiques sur un pays au , son plan de redressement d’un montant affiché de 43,8 milliards d’euros en 2026, tout était fait pour frapper les esprits et dire stop à l’emballement de la dette. Au milieu du freinage des dépenses budgétaires et sociales (20,8 milliards d’euros) et des hausses de rentrées fiscales (10 milliards d’euros), deux mesures émergent : l’, qui consiste à geler les tranches du barème de l’impôt, les pensions et les prestations sociales, et la suppression de deux jours fériés pour inciter les Français à travailler davantage.

Dans la foulée du discours aux armées prononcé dimanche 13 juillet par le chef de l’Etat, le premier ministre tente de provoquer un choc d’opinion en invoquant le moment particulier que vit le pays, la perte de souveraineté qu’il encourt dans un monde devenu de plus en plus brutal et de plus en plus compétitif. Lui qui, depuis 2007, fustige l’excès d’endettement n’a pas eu à forcer sa nature. Comparée au budget 2025 que Michel Barnier avait dû bâtir à la hâte à partir de coupes budgétaires sans vision, l’amère potion présentée par François Bayrou a le mérite de mettre en cohérence la nécessité de contrôler la dette et celle de redynamiser la production pour rendre soutenable le financement des dépenses publiques, se protéger et rester dans la course.

Pour se donner une chance de réussir, François Bayrou affirme vouloir . C’est effectivement indispensable au regard des efforts demandés à la grande masse des Français. A ce stade, la part réclamée aux plus aisés et aux entreprises reste cependant trop imprécise pour convaincre. Le chef du gouvernement veut aussi s’engager dans une sorte de donnant-donnant avec les entreprises sous la forme d’un choc de simplification pour obtenir une réduction des aides et des subventions. Là encore, l’ampleur de cette remise à plat reste évanescente.

Une esquisse à travailler

L’autre zone de fragilité est l’annonce d’un nouveau tour de vis dans l’assurance-chômage, alors que plus de450 000 postes restent non pourvus. A juste raison, ce projet braque les syndicats, que le premier ministre avait, au contraire, voulu remettre dans le jeu. Les réformes de l’Unédic se sont succédé ces dernières années, l’une chassant l’autre avant même que ses effets puissent être évalués. En plein ralentissement de l’activité, ce nouveau durcissement alimente le sentiment que le gouvernement frappe toujours du même côté alors que les entreprises, toujours réticentes à l’embauche des plus de 50 ans, ont leur part de responsabilité.

Le plan annoncé est une esquisse à travailler. Même si le groupe socialiste a qualifié la copie de , c’est avec lui que le locataire de Matignon entend prioritairement discuter pour ne pas se retrouver à la merci du Rassemblement national. Le pari est de remporter la bataille de la responsabilité, après le spectacle peu convaincant qu’a donné l’Assemblée nationale ces derniers mois. Il ne pourra être gagné que si la copie finale parvient à réellement concilier efficacité et équité.

Le Monde

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