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Michel Barnier : « Robert Badinter cherchait à rendre la République plus conforme à l’idéal »

Il y a quarante-quatre ans, en septembre 1981, l’Assemblée nationale résonnait d’une voix dont le souffle puissant savait réveiller les consciences, éclairer les esprits, inspirer les âmes de la représentation nationale : Robert Badinter vibrait, tonnait, défendait avec force et passion l’abolition de la peine de mort.

Homme de combat, il fit de la lutte politique la plus noble des batailles, car ce qui l’animait n’était pas l’intérêt partisan, mais le parti de l’homme. Il avait foi en l’être humain. Il croyait en une certaine idée de l’Etat, source du droit, mais qui ne pouvait se les arroger tous ; il avait la conviction que la justice ne pouvait avoir recours à la violence, car c’était le moyen même qu’elle visait à éradiquer. Sa voix, la force de son argumentation, la puissance de ses convictions imposaient le silence et le respect à un hémicycle qui l’écoutait.

A l’époque, l’Assemblée nationale était encore un lieu de débats sereins, où l’affrontement des convictions n’empêchait pas le respect, et où l’on cherchait à faire avancer le pays. Nous n’étions pas du même bord, mais j’ai été fier de voter l’abolition de la peine de mort, le 18 septembre 1981. Et de poursuivre par la suite, un dialogue régulier et passionnant avec cet homme d’Etat français et européen.

Affaire de conscience

Son arme, c’était la voix ; son champ d’action, c’était la loi, qu’il brandissait pour lutter contre toute forme d’antisémitisme et de racisme, cette lèpre de l’humanité qu’il avait éprouvée dans sa chair et qu’il n’eut de cesse de dénoncer avec rage. Au soir de sa vie, voir les mêmes mots de haine que ceux qu’il voyait enfant, avant la guerre, inscrits à la craie sur les murs de son lycée parisien, le mettait hors de lui. Adhérer à l’antisémitisme et au racisme : une , clamait-il. Crime contre les hommes et les femmes, crime contre la République, contre l’égalité, contre la fraternité, contre la laïcité.

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